Tourisme en Colombie sans Pablo Escobar

Pablo Escobar : ce que les Colombiens pensent vraiment (et pourquoi les touristes doivent tourner la page)

Quand on évoque la Colombie à l’étranger, le nom de Pablo Escobar surgit souvent avant même les mots arepa, café ou Amazonie. C’est une réalité. Une réalité pesante, usante, parfois humiliante pour celles et ceux qui vivent ici, dans un pays qui a tout donné pour se relever d’un passé aussi lourd.

 

Dans l’imaginaire collectif occidental, Escobar est devenu une icône pop. Il est sur des t-shirts, des mugs, dans des séries à succès, des mèmes douteux. En France comme ailleurs, certains ne peuvent pas s’empêcher de faire une “blague” : “Alors, t’as ramené un peu de blanche ?”, “Tu bosses pour les cartels maintenant ?”, “Salut Pablo !”.

 

En Colombie, personne ne rit.

 

Une blessure, pas un mythe

Ici, Escobar n’est pas un héros. Il est une plaie ouverte dans l’histoire du pays. Pour les Colombiens, il symbolise des années de terreur, de peur quotidienne, d’explosions, d’assassinats ciblés, d’enfants arrachés à leur famille, de juges et journalistes exécutés, de quartiers entiers traumatisés.


Plus de 4 000 personnes ont perdu la vie directement à cause de ses actions. Sans parler des conséquences à long terme sur l’image du pays, son économie, sa stabilité.

 

Alors non, les Colombiens ne font pas de “tours Escobar” entre amis. Ils ne racontent pas leurs anecdotes de jeunesse “avec le patron du mal”. Ils évitent le sujet. Ils avancent.

 

Une obsession… exportée

Et pourtant, paradoxalement, le tourisme lié à Pablo Escobar explose. Mais pas auprès des Colombiens.


À Medellín, la majorité écrasante de ceux qui participent à ces circuits sont… des Américains.
Des touristes qui paient jusqu’à 300 dollars pour “voir où il vivait, où il est mort, où il a enterré son argent”. Des tours vendus comme des expériences “exclusives”, mais qui sont en réalité des attrape-touristes, souvent organisés sans scrupules, parfois même par des personnes proches de l’ancien cartel.

 

Les Colombiens, eux, les voient passer avec mépris, voire colère. Car ce genre de tourisme ne respecte ni les familles des victimes, ni la ville de Medellín, qui a tant fait pour tourner la page.

 

La vérité sur la consommation

Un autre malentendu très répandu est celui de la consommation de cocaïne. L’image véhiculée est simple : la Colombie serait le pays de la cocaïne, donc tout le monde en consommerait. Faux.

 

La très grande majorité des consommateurs se trouvent… en Europe et en Amérique du Nord.
Les États-Unis, la France, l’Allemagne, le Royaume-Uni : ce sont ces marchés qui financent les réseaux. En Colombie, la consommation de cocaïne est marginale, souvent cantonnée aux milieux les plus précaires ou aux grandes villes.

 

Les drogues les plus présentes en milieu populaire sont souvent plus destructrices, plus accessibles, comme la “bazuco”, un résidu de coca mélangé à des solvants et fumé dans des conditions dégradantes. On parle ici de problèmes sociaux, pas de fétichisme exotique.

 

La Colombie d’aujourd’hui

La Colombie d’aujourd’hui est un pays en pleine renaissance, riche en biodiversité, en culture, en gastronomie, en initiatives locales. Medellín n’est plus la capitale du cartel, mais un exemple mondial de transformation urbaine et sociale.

 

Partout dans le pays, des communautés se battent pour faire vivre un tourisme éthique, local, respectueux des habitants et de l’environnement. Ce sont ces gens-là qu’il faut soutenir. Pas ceux qui continuent d’exploiter le fantôme d’un homme que le pays entier préférerait oublier.

 

Tourner la page… pour de bon

Non, Pablo Escobar ne fait pas partie du folklore. Il n’est pas une attraction. Il est une cicatrice.
Venir en Colombie et demander où on peut “voir Pablo” ou “choper de la bonne” n’est pas juste déplacé. C’est blessant, humiliant, et profondément injuste pour un pays qui lutte encore pour se reconstruire.

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